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Entretien: Gaetan Supertino, journaliste freelance, Europe 1
Entretien mené le 12 avril 2016
"En faisant bien notre boulot de journaliste, on contribue, j’espère, à la prévention de la radicalisation des jeunes.
Lorsqu’on présente les djihadistes, il faut faire attention à ne pas valoriser leur action et leur parcours. Il faut raconter toute l’histoire de la personne, ne pas la présenter comme un défenseur de l’islam, mais comme un criminel avec son histoire, des détails, non comme un héros.
La Une du Figaro le 14 novembre 2015
Il ne faut pas parler de la radicalisation que lorsqu’il y a un attentat. La radicalisation est un problème de société.
Il faut faire attention à ne pas présenter les choses comme un combat du bien contre le mal.
La Une du Parisien le 15 novembre 2015
Pour les journalistes, il y a une atmosphère qui a changé mais la peur ne doit pas être quotidienne.
Il y a 20 000 journalistes au moins en France, ce sont donc 20 000 personnes différentes, on ne peut donc pas dire : les journalistes somme cela, font comme cela.
Pour être lu, il faut avoir un bon titre et une bonne image. On parle de titre “incitatif”, c’est-à-dire en fait racoleur. Il y a souvent un décalage entre la “titraille” et l’article. Mais cela peut contribuer à être lu.
Le journaliste raconte des histoires. Il y a une part de spectacle, ou du moins de construction. Contrairement au chercheur, peut-être, le journaliste doit séduire les gens.
Un exemple de une visant à interpeler le lecteur
Les journalistes investissent les réseaux sociaux. Pour ce faire, les médias ont des community manager : des personnes qui connaissent le langage spécifique de chaque réseau social. Cela fonctionne.
Il y a aussi les vidéos très courtes qui fonctionnent bien et une nouveauté de Facebook : des vidéos “pop-up”.
Il est important pour le journaliste de faire des articles insolites, pour qu’ensuite on les lise sur des choses sérieuses.
Il y a un problème dans le traitement médiatique de l’islam en France : soit on parle des musulmans comme des criminels, soit comme des victimes, soit des djihadistes, soit des victimes de discrimination. On ne parle donc que des problèmes.
De manière générale, on parle de religions seulement lorsqu’il ya des problèmes. On devrait en parler comme ça.
Vous avez raison : il faudrait un suivi sur les sujets importants. C’est ce qui est difficile pour le journaliste : il y a toujours une nouvelle actualité.
Il ne faut pas hésiter à contacter des journalistes, les meilleurs articles des journalistes, c’est quand ils ont un accès direct à une source d’information.
Le journaliste est un témoin, il raconte, de manière désintéressée.
Il y a différents types de journalistes. Les éditorialistes, ce sont ceux qui donnent leur avis. Normalement ce sont les seuls à le faire. On a l’impression que les journalistes, ce sont les éditorialistes, car ils prennent beaucoup de place. C’est un problème.
Le journaliste doit pouvoir d’adresser à un public de 12 à 80 ans, il doit être compréhensible par tous. C’est l’objectif du journaliste professionnel.
Il faudrait parler plus de l’embrigadement des jeunes. Mais je ne pense pas qu’un magazine puisse être entièrement consacré à cette question."
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